Acces to healthcare and health care quality in the DRC and Belgium

An exchange between E.D. (pen name) from the University of Antwerp and Joseph Mubuto from the Université Catholique de Bukavu.

Letter 1

Chère E.D.

C’est pour moi un réel plaisir que d’être votre binôme pour ce projet de correspondance. J’espère que cette lettre vous trouvera bien portant et en bonne santé. Dans cette lettre, je vous parle des problèmes d’accès aux soins de santé de base dans mon pays. 

Depuis Alma Ata les soins de santé de base sont perçus comme étant un droit dont tout le monde devrait jouir. Mais ce n’est malheureusement pas le cas dans mon pays. Si une partie de la population a l’impression de jouir de ce droit, une autre partie pourtant majoritaire n’en jouit pas du tout. L’accès aux soins de santé est un luxe que ne peuvent s’offrir plusieurs. Lorsque certains n’ont pas accès aux soins à cause d’une situation financière précaire, d’autres dans les zones rurales n’y accèdent pas par manque de structures sanitaires. Et ce n’est pas tout. Plusieurs autres ne jouissent pas de ce droit par manque de voies de communication praticables. Pour ne pas arranger les choses, l’insécurité sévissant à l’est du pays  aggrave la situation depuis des décennies. 

Cette situation dure depuis longtemps. Le ministère de la santé a souvent pensé à des pistes de solution et mis en marche des politiques pour pallier cela mais, à ce jour, les résultats sont tels qu’il y a encore du chemin à parcourir. Le plan national de développement sanitaire (PNDS) recadré pour la période de 2016 à 2020 visait une couverture sanitaire de 50%. Cependant en 2023, il est difficile de croire si l’objectif avait été vraiment atteint.Y a-t-il des changements, des améliorations ? Certes. Mais le rythme est tellement lent que le mal fait toujours des victimes.

En 1986 la Charte d’Ottawa dont le point focal a été la promotion de la santé, a perçu la santé comme étant une ressource de la vie quotidienne. Dans son plaidoyer, la Charte présente cette dernière non seulement comme une ressource de développement individuel mais aussi comme celle importante pour le développement tant social qu’économique. Le manque d’accès aux soins de base dont souffre mon pays est fort probablement un des facteurs freinant son avancement. Une population en mauvaise santé ne peut être un acteur de développement

Nous sommes face à un problème de grande envergure connu par tout le monde. Il est souvent repris par les médias et chanté un peu partout. Mais à force, au lieu de susciter plus d’intérêt, la récurrence du thème garde les bouches ouvertes mais tait la volonté d’agir chez plusieurs. L’indignation a cédé la place à une routine et la réthorique: « Les choses ont toujours été ainsi avant moi. Qu’y puis-je donc ? ». Telle est la réflexion de plusieurs. La persistance du problème les pousse à remettre en cause leur capacité de mener une quelconque action, même celle des moindres qui soient.

Les ressources humaines pour la santé à leur tour posent  problème : elles ne sont pas équitablement réparties. Elles sont surabondantes en milieu urbain alors qu’en milieu rural on en note un manque cruel. Il s’observe également que  certaines catégories (médecins généralistes, infirmiers) sont en surproduction alors que d’autres catégories (accoucheuses, réanimateurs, assistants en pharmacie) sont en sous production. La modicité des salaires brise également la motivation des personnels de santé qui par moments sont contraints de cumuler plusieurs autres activités pour subvenir aux besoins de leurs familles.

Les populations en milieu rural et celles des couches sociales vulnérables sont les plus en proie à cette triste réalité. Comme si les fléaux de la guerre, de la pauvreté et du manque d’instruction ne les avaient pas assez ravagés, il fallait que s’invite aussi le charlatanisme. Mais quoi de plus normal ? Des vendeurs d’illusions sous différentes casquettes en profitent pour dépouiller ces malheureux du peu qu’ils possèdent. C’est avec tristesse que l’on voit des personnes malades se tourner vers féticheurs, guérisseurs et autres possibilités dont les garanties sont moindres. 

C’est quand même triste de voir une femme s’évader de l’hôpital pour aller faire soigner son bébé chez un « munganga mzee » (guérisseur), simplement parce qu’elle craint de ne pouvoir supporter la facture des soins de son enfant.

Face à tout ceci je me dis que l’espérance est une ressource importante dont je ne peux me priver si je veux éviter le piège de la résignation. Je sais bien qu’espérer est loin de suffire et qu’il faut des actions concrètes. C’est pourquoi j’estime que le refus d’accepter la situation telle qu’elle demeure depuis longtemps est un premier pas quoique pas très impressionnant.

Voici mon ressenti par rapport à la réalité de l’accès aux soins de santé dans mon pays. Ce qui me pousse à chercher à savoir si l’accès aux soins de santé de base est un problème majeur dans votre pays. Comment le gouvernement de votre pays gère-t-il les problèmes d’accès aux soins ? Comment vivez-vous personnellement cette réalité ? 

Merci et portez-vous bien.

Joseph MUBUTO

Letter 2

Beringen, 23-03-2023


Dear Joseph,

I hope this letter finds you well and that you are as enthusiastic as I am that we are partners in this project. I am looking forward to sharing our opinions, thoughts, feelings, and concerns about access to healthcare in our countries. 

Before I start with my actual letter, I will shortly introduce myself: my name is E.D. (pen name), I am 24 years old and I live in Belgium. I am studying medicine in Antwerp and I love traveling, learning a new language, and doing sports like running and cycling. 

I was counting down the days to receive your letter. It is interesting to read what problems you face concerning basic health care in the Democratic Republic of Congo and what your feelings are about the topic. In Belgium, health care is organized in a different way. 

Belgium has a good national social security system that allows everyone to have access to all medical services. All Belgians are required to have health insurance, either through a public insurer or a private insurer. Health insurance provides coverage for a range of medical services including doctor visits, hospital admissions, and drug prescriptions. Because of this, access to health care is generally considered to be very good: there is a high level of coverage and a wide range of services available. 

Most hospitals are public and medical services are very good. Costs are paid by the Belgian social security, which leads to a limited amount that has to be paid by the patient himself/herself. But still, I think there are people who cannot afford basic medical care due to financial problems. There is a little percentage of the population that has medical needs and cannot afford them. When I was doing my internships in the hospital I observed that people with a low income have more severe medical problems, because they postponed medical needs because of financial issues. These severe medical problems lead to even bigger costs, this is a vicious circle.

Another challenge we face is that there is a shortage of medical personnel. The workload in the hospitals is huge. There are not enough nurses, too few psychologists, doctors,… This results in long waiting lists for example at the psychiatry institutions. I have heard many stories of young adolescents who suffer from anorexia or bulimia and they couldn’t go to a specialized institution because there were no empty beds. The situation is harrowing. In my opinion, young adolescents are an important group, we need to pay attention to them and make efforts: they deserve the proper help they need, and we cannot let them down.

Do you see the same issues in psychiatry as we do? Or are the needs for medical services totally different from other priorities? 

I hope the government will take it as a priority to make health services accessible for everyone. 

I am looking forward to keep learning from each other, keep sharing and keep writing. 

Thank you and be well.

Letter 3

Chère E.D.,

Je trépignais déjà d’impatience de vous lire. C’est un réel plaisir pour moi d’en apprendre un peu plus sur vous à travers ta lettre. Comme vous, je suis aussi étudiant en médecine. J’étudie à l’Université Catholique de Bukavu. Je suis également chrétien et j’aime la nature.

A dire vrai, je trouve très intéressant la manière dont sont organisés les soins de santé en Belgique. C’est réjouissant de voir comment les efforts sont conjugués autant par le gouvernement que par le secteur privé pour garantir à la population l’accès aux soins de santé par le moyen de la sécurité sociale. En République Démocratique du Congo, la sécurité sociale n’est pas tout à fait au point. L’assurance maladie jusque-là n’est pas non plus effective. Les soins de santé sont entièrement financés par le patient lui-même pour la plupart des Congolais. Il y a cependant une minorité représentée par les employés de certaines sociétés et organisations non gouvernementales qui voient leurs soins de santé couverts par leurs employeurs. On observe aussi des mutuelles de santé qui émergent timidement un peu partout dans le pays, ce qui facilite quand même pour certains congolais l’accès aux soins de santé de base. Mais malgré l’allégement du fardeau qu’occasionne la  venue des mutuelles de santé, le manque de revenu stable et régulier demeure un problème majeur pour honorer les cotisations que requièrent les mutuelles.

Les besoins en services médicaux sont larges et représentent des défis à relever. Ils touchent autant le personnel médical que les structures de santé. Comme je l’avais déjà évoqué dans ma précédente correspondance, il y a un certain déséquilibre en ce qui concerne le personnel. En milieu urbain il y a une surabondance des professionnels de santé alors que dans les villages il en manque cruellement. C’est, en partie, à cause de la situation sécuritaire dans les milieux ruraux. Elle n’est pas du tout bonne et plusieurs craignent de risquer leur vies. Les conditions de vie dans ces milieux ne sont pas non plus rassurantes. Aussi,  certaines catégories sont en surproduction comparativement à d’autres: il y a plus de médecins, d’infirmiers  qu’il n’y a d’accoucheuses, de réanimateurs, d’assistants en pharmacie, …

Les structures de santé sont aussi une question préoccupante. Il est vrai que le nombre est en pleine croissance mais il y a encore des villages où l’on peine à trouver un centre de santé, un hôpital. Pour accéder aux soins, les villageois sont obligés de parcourir des kilomètres. Et cela à pied par moment suite au manque des voies de communication praticables. Il y a aussi des hôpitaux et centres de santé qui ne disposent pas d’un équipement adéquat et moderne, ce qui altère la qualité des services qu’ils offrent.

La psychiatrie dans mon pays  est un domaine qui se heurte à un obstacle majeur : la  conception socio-culturelle de la santé mentale. Pour bon nombre les problèmes psychiatriques ne se référant pas à la démence sont minimisés. Beaucoup de personnes souffrant d’affections psychiatriques n’ont pas accès à une prise en charge correcte à cause de la croyance en une origine mystique des tels problèmes. Par-dessus cela, il y a aussi une pénurie des centres psychiatriques et de personnel qualifié pour prendre en charge les troubles psychiatriques sur l’étendue du pays. C’est ce qui explique le fait que l’on retrouve encore des personnes instables mentalement en train de parcourir les rues, perturbant l’ordre public et se rendant auteurs d’agressions.

Au vu de tout ce qu’il y a comme problèmes dans mon pays, le défi est encore grand. Il y a encore beaucoup d’efforts qui doivent être fournis pour que les choses changent. Il faudra non seulement du temps mais aussi davantage d’implication. Néanmoins, je me réjouis de ce que la prise de conscience et les efforts naissants de jeune génération que nous sommes me permettent d’entrevoir un lendemain meilleur.

Avec tout ce que vous connaissez comme problèmes en matière d’accès aux soins de santé pour les personnes financièrement vulnérables, que pensez-vous qu’il faille pour rendre les choses meilleures ? Aussi, comment envisagez-vous l’avenir ?

Échanger avec vous sur ce sujet a été vraiment passionnant et enrichissant pour moi. J’ai hâte de vous lire à nouveau et bientôt!

Amicalement,

Joseph Mubuto

Letter 4

Dear Joseph,

I hope this letter finds you well. It is lovely to learn a little bit more about you, I see that we have common interests.

It is interesting to read how health care is organized in the Democratic Republic of Congo. I notice there is a big difference between healthcare and social security in our countries. In the end, I believe this is a political discussion: is it part of the priorities of a government or not and is the government prepared and able to spend the required amount of money in the health care system.

I believe in a country with a strong economy it is easier to organize a good healthcare system. And a strong desire from the government to take care of people will also benefit a good healthcare system. 

I fully understand the lack of a stable and regular income remains a major problem in your country. Support in the local economy and a decent income might benefit access to health care providers. Unfortunately, this is something that cannot change from one minute to another and will take courage from politicians and local and/or external investors.

I understand there is a big difference in healthcare access between cities and villages. We don’t have this situation here in Belgium as Belgium is very small compared to the Democratic Republic of Congo (the DRC is 75 times bigger than Belgium and 10 times the population). The distance between villages and cities is neglectable here and health care centers are easily accessible by private and public transportation. All healthcare centers have adequate and modern equipment and if this is not present in the local center, you will be sent to another center where the equipment is available. Do you have an idea how far some people need to walk to seek medical help in some regions of your country? How do you think health care could be better accessible for them? Can external support from NGOs or other organizations help the Democratic Republic of Congo to set up local health care centers with adequate and modern equipment?

Also, security is not an issue here. I said before politics and economics are crucial to establishing a good healthcare system, but a secure environment is crucial as well. Can this be provided by a good political system that people trust and believe in?

What you face in your country regarding the socio-cultural conception of mental health, was also the case here, let’s say 10 years ago and we are still not where we need to be. Now mental health is taken care of in kindergarten, in schools, at work, and for elderly people. We see more and more people are affected by mental health issues. Young adolescents feel the pressure to perform and to be part of the adult world as soon as possible, expectations are higher and higher and the covid pandemic only made it worse. I think the group of young adolescents will face more mental health problems than before and that our health service needs to be prepared for this.

As people get older and older we see a lot more health issues related to this group of people: dementia, cancers, cardiovascular diseases,… This will increase costs and will become a financial burden for the health care system and social security. So politicians should need to make decisions for the long term and not focus on the ‘now’.

You ask “With all the problems you know about access to health care for the financially vulnerable, what do you think is needed to make things better?”. This question is not easy to answer as the issue is very complex. We as medical students cannot change the ‘political system’, however, we can try to put it on the agenda of politicians as they are the decision-makers of a country. One of the problems is that – in most cases – they think on the short term and not on the long term. Because changing the healthcarehealth care system is a long-term project, we need to keep on pushing this and ‘sell’ this over and over again.

In the shorter term, I think healthcare providers (doctors, nursing people, etc.) should set up a medical syndicate or medical association where they can discuss in working groups the issues they are facing. This way they can come up with short and long-term actions and put pressure on the politicians.

Exchanging with you on this subject has been really exciting and enriching for me. I look forward to reading from you again.

With kind regards,

E.D.